- Nous devons savoir qui a fait ces... choses.
- Elles ne sont pas à vendre.
- Qui a parlé d’en acheter ?
Gemmell n’avait pas peur de ces mots. Il avait déjà eu affaire à des gens dans son genre, prêts à tout pour avoir l’un de ses objets de collection. Pourtant son regard le glaçait des pieds à la tête. Il y avait quelque chose d’inhumain dans ces deux yeux, une froideur profonde et meurtrière.
- Nous voulons seulement connaître le nom et le lieu de résidence de l’artiste, rien de plus, continua l’homme aux yeux froids.
- Je suis sincèrement navré mais je ne révèle jamais ces informations.
Il y avait trois autres hommes vêtus avec la même sobriété que Nébu. Des habits noirs et amples. Les costumes n’avaient rien de remarquable, exceptée une croix rouge, l’extrémité des quatre branches, fleuronnée.
- Voyez-vous...
- Gemmell.
- Oui voilà, Gemmell. Je vous aime bien, vous m’êtes sympathique... commença Nébu.
- On pourrait le torturer, intervint Squall.
Ces mots avaient été prononcés avec indifférence, comme des banalités.
- Voyons Squall, mon ami ici présent n’aimerait sûrement pas ça et je suis sur que nous pouvons nous entendre, pas vrai ? Dit Nébu en se retournant vers le collectionneur.
- Je... qui êtes-vous ? balbutia Gemmell.
- Simplement des amateurs d’Art, mentit un troisième homme. Et nous sommes particulièrement intéressés par le talent de celui qui a fait ces œuvres.
- Vous... vous mentez.
- C’est vrai, mais je vous aime bien aussi et il me serait pénible de vous faire du mal pour avoir cette information.
Gemmell sentit le sang refluer de son visage. Des quatre hommes, celui-ci était le plus terrifiant. Le dernier du quatuor ne semblait pas du tout concerné par l’échange et il parcourait la grande galerie d’exposition avec ses yeux de lynx.
- Je vais essayer de le joindre, attendez-moi ici.
- Avec grand plaisir. Je suis heureux que vous ayez trouvé la voie de la sagesse. Conclut Nébu.
- Je dois... aller dans l’arrière salle, veuillez m’excuser un instant.
- Bien entendu.
Une fois qu’il fut parti, Nébu perdit son sourire et se retourna vers ses acolytes.
- J’ai cru que j’allais le tuer, commença Squall.
- On sait tous que la diplomatie t’a toujours rebuté, lui répondit sèchement Nébu.
- Vos gueules bandes de crétins, j’en ai ma claque de vous entendre, coupa le quatrième homme.
- A vos ordres, Atanis. S’excusèrent rapidement les trois autres.
- Enik, demande au QG de retracer l’appel du proprio, il va certainement prévenir notre cible de ne plus venir pendant un temps. Squall, reste dehors. Je ne voudrais pas que tu découpes notre informateur par erreur. Nébu, confirme-nous le taux de Particules Universelles des sculptures. J’ai encore du mal à croire qu’on nous ait envoyés ici pour elles.
Squall et Enik se mirent tout de suite à la tâche. Atanis poursuivit son inspection. Il errait dans la partie sculpture de la galerie, appréciant la qualité de bustes nus de femmes en terre rouge. Nébu enfila une paire de lunettes, imposante et noire. Il regarda tout autour de lui, sondant chaque pièce de collection pour vérifier le taux de Particules Universelles. Il confirma ainsi que les tableaux aux murs n’avaient rien de spécial, tandis que la plupart des sculptures atteignaient des records inespérés. Il enleva les lunettes... qui disparurent de ses mains.
- Confirmation du taux PU Atanis.
- Alors nous n’avons plus qu’à attendre.
- J’ai la destination de l’appel, Monsieur, intervint Nébu, il semblerait que l’homme ou la femme que nous recherchons habite à quelques rues seulement d’ici. Ordre de bouger ?
- Pas encore messieurs. Attendons le collectionneur.
- Pour le tuer ?
Squall avait passé sa tête dans l’entrebâillement de la porte. Atanis se retourna soudainement vers lui, un couteau de lancer entre le pouce et l’index. Il le propulsa à travers toute la grande pièce. La lame se ficha à quelques centimètres du petit homme qui disparut en un rien de temps dans un couinement de surprise.
- Il commence sérieusement à m’agacer celui-ci.
- Je ne pensais pas qu’il pourrait avoir autant peur un jour, ricana Nébu.
- Un mot de vous et je l’égorge, poursuivit Enik.
- Ça ira, ça ira.
- Nébu, notre ami revient.
C’était vrai, Gemmell avait rejoint les quatre hommes, le teint cendreux.
- Je n’ai pas réussi à les joindre...
- Tes mensonges puent tout autant que toi, s’énerva Nébu, je te conseille de nous dire ce que tu sais.
Pour confirmer ses menaces, un long sabre apparut comme par magie dans les mains de celui-ci. Gemmell n’en croyait pas ses yeux.
- Par les dieux ! Comment... ?
La lame vint se poser contre la gorge sèche du pauvre homme.
- Alors, toujours aussi sûr de toi ?
- La femme de l’artiste arrive, prononça Gemmell entre deux sanglots.
- Parfait ! Répondit Nébu avec un grand sourire.
Au moment où Gemmell regarda les mains de son agresseur, le sabre avait disparu. Il se demanda s’il n’avait pas rêvé... Mais quelque chose au fond de lui savait ce qu’il avait vu et ne parvenait toujours pas à comprendre... La prière qu’il adressa ne fut pourtant pas pour lui, mais pour la pauvre Sihine qui se dirigeait vers ces quatre fous. Il avait réussi à parler à Stanley. Il ne l’avait pas inquiété outre mesure, demandant simplement quand il pensait venir. Lorsque le gaillard lui avait appris que sa femme venait de partir, le collectionneur était devenu livide. Il avait réussi à convaincre Stanley qu’il n’y avait aucun problème, puis il avait appelé la police. Ils seraient là le plus vite possible.
Mon Dieu, faîtes que Sihine prenne son temps...
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