Voici un homme en fin de vie ;
Voici un homme sans sourcils,
Un homme qui doucement plie,
Aux petits pas d’un corps fragile.
On pourrait l’appeler Courage,
Ou Dignité - je ne sais pas
Ce qui dirait le mieux sa rage
D’y croire encor, le regard droit.
Chaque demain tient à un fil,
À une fille, à cette enfant.
Sur sa joue on peut voir un cil ;
C’est le témoin d’un jour tremblant.
Voici un homme en fin de vie ;
Voici un homme sans sourcils,
Un homme qui doucement plie,
Aux petits pas d’un corps fragile.
Elle a neuf ans et savait rire,
Les yeux brillants – c’était « avant ».
Qui sait ce qu’il faudra lui dire ?
Elle entre dans la cour des grands.
Elle a neuf ans ; elle a un père.
Mais l’aura-t-elle encore demain ?
Ses neuf ans, c’est l’âge-misère.
Je l’ai vu serrer fort sa main…
Voici un homme en fin de vie ;
Voici un homme sans sourcils,
Un homme qui doucement plie,
Aux petits pas d’un corps fragile.
Cet homme est venu l’autre soir :
Je vois son ombre au restaurant.
J’en pleure ; il faisait peine à voir !
Mais il nous a rejoints pourtant.
C’était sans doute un privilège,
Peut-être une dernière fois…
Lui, verra-t-il tomber la neige?
Oh froid, ne nous le souffle pas.