La deuxième tête. (Mutisme)

Il cherchait sa vie alors
Et ne trouvait que du béton
Et les charpentes des bâtisses
Etaient des souvenirs heureux.
Et son souffle dans le sien
Et ses doigts sur son visage
Ses yeux aveugles d’habitude
Etaient un avenir heureux.
Il était libre comme l’air
Mais l’air était souillé
De pellicules de peaux mortes
Qui ne faisaient que retomber.
Et les neiges de printemps
Et les pluies d’orage lourdes
Ses pieds foulant la même pièce
Qui ne faisait que se fermer.
Il mutilait ses meurtres
Courait après son pancréas
Se saoulait de sa bile
Et mourait pour jamais.
Et le temps sourd aux murmures
Et la terre muette aux messes
Ses mains jointes autour du cou
D’un passé bien trop présent.
Il courait les jambes tranchées
Dans des champs de crucifiés
Sur des croix de calendrier
Aux pages jaunies de poussière
Aux jours ponctués de larmes
Et aux silences nocturnes
Aux lunes vidées de nébuleuses
Qui ne hurlaient que des tornades.
Il jouait du piano
Sans avoir fait de solfège
Et les marteaux et les cordes
Soufflaient des notes bien trop salées.
Et l’opéra moderne
Et l’orchestre de cadavres
Par ses gestes de baguette
Jouaient des noces enterrées.
Il était en septième guerre
Contre les continents arides
Et dans son barda, la gourde
Etait remplie de placenta.
Et les campagnes de massacres
Et la libération du vent
Sous ces mains cornées de sang
Le faisaient sourire d’ironie.
Il prit le demi tour
De vingt ans de marche forcée
Et rêvait de faire craquer
Le vieux parquet de son grenier.
Et rien n’avait changé
Et tout était détruit
Sous les décombres de ses os
La vie portait un autre nom.
Il ouvrit les fenêtres
Des catacombes de son monde
Passa un coup de balai
Et dépoussiéra des photos.
Et les cartons empilés
Et les meubles démontés
Sous le porche du palais
Déménageaient pour une cabane.
Il cherchait sa vie alors
Et ne voulait rien trouver
Et les charpentes des bâtisses
Etaient un avenir heureux.
Et son souffle dans le sien
Et ses doigts sur son visage.
Sous sa peau étaient présents
De futurs souvenirs heureux.

Il cherchait sa vie alors
Et ne trouvait que du béton
Et les charpentes des bâtisses
Etaient des souvenirs de feux.
Et son souffle dans le sien
Et ses doigts sur son visage
Cherchant le fruit de ses entrailles
Qui n’était que devant lui.

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