J’aimerais crever
D’une embellie pulmonaire,
Dans un pays
Qui n’existe pas.
Il y a tant de messies,
Il y a tant de beautés,
Que c’en est écoeurant.
Il y a tant de gens qui s’aiment,
Et autant qui se déchirent,
Que c’en est insoutenable.
Je voudrais caresser les sables turquoises des océans afin d’oublier ce que je ne sais pas encore, je voudrais garder dans mes mains les mèches des arbres qui portent vos noms pour apprendre ce que je sais déjà. Je voudrais établir la tyrannie des mots pour planter des fleurs au fond de vos gorges.
Il y a tant de couloirs,
Tant de portes fermées,
Tant de fenêtres ouvertes
Que c’en est effrayant.
Il y a tant de tant
Et si peu de temps.
Rêve, charogne! Tu as le temps derrière toi, mais la mort, elle, sera toujours devant, à quelques pas. S’il suffisait de rêver, je serais la montagne qui se déplace à genoux, je serais ces mers mortes d’avoir trop coulées, je serais ces demains que l’on appelle hier, je serais le rouge et le rose des muscles du bonheur, je serais la moelle qu’il faut sucer du cœur, je serais ces histoires que l’on ne raconte que muet, je serais ces musiques composées du néant, s’il suffisait de rêver, je serais vivant.
Il y a tant mystères,
Il y a tant de lieux communs,
Que c’en est à vomir.
Il y a tant de prophètes,
Il y a tant d’assassins,
Que c’en est réjouissant.
Rêve, charogne! Tu fais partie de ce monde. Tu fais partie de ces voitures sur l’autoroute qui ne mènent qu’aux salaires, à la besogne stupide qui te fais rêver de ce que tu n’auras jamais, alors que le reste est ailleurs et qu’il attend qu’on le trouve.
Et je me noie dans l’oxygène artificiel des bonjours, dans la saveur gustative d’un alcool à sept cent vingt degré, dans la course à la folie où ne jouent que les vivants, dans les constructions ambitieuses des structures du bonheur d’un simple petit consommateur de rien du tout.
Soyons fous pour être vivants, qu’importe d’être pathétique, nous aurons le temps d’être sobres lorsque nous serons mort.
Il y a tant de rêves morts,
De sourires avortés,
D’yeux de cannabis
Et de langue aux chats.
Il y a tant d’utilités,
De bidons de pétrole,
De langues étrangères
Qu’on ne parle qu’en dormant.
Il y a tant de rêves…
Que s’ils suffisaient,
Je serais vivant.