Je m’assois sur le toit du monde qui n’est autre que ma tête, et le syndrome de la page bleue voile mes iris. J’entends le vent mêler mes cils aux sables qu’il emporte. Je sens la caresse d’un trois cent cinquante sept magnum le long de mes empreintes fraîches. Je sens mes narines se gonfler de la satisfaction d’un travail inaccompli et mes poumons s’emplir d’un air impopulaire. Le sourd grondement dans ma cage thoracique me rappelle à ma mort certaine.
A ce moment précis, je suis le sac plastique, je suis la route empruntée mille fois bordées de mannequins noirs et barrés d’une croix rouge, je suis cet homme aux dents blanches sur l’emballage de vos cœurs, cet homme qui prétend qu’un couteau est la meilleure défense possible. A ce moment précis, je suis l’intemporelle absence de vos corps. A ce moment précis, je nais de ma mort.
Je balance mes jambes chacune leur tour, la faim gronde dans ma tête. Je fixe ce soleil qui ne brûle que le temps et je le remercie. Enfin, je baisse mon regard pour contempler la plus belle œuvre d’art jamais créée. C’est ce sol anthracite parsemé de brume rose et de fragments de ruines des temples de la consommation. C’est ce spectacle qui s’offre à ma gorge déployée. Il n’y a pas plus belle nature morte. Ronces et poussière. Sang et ciment. Les nuages ont fait la paix et le ciel n’est que lumière. En l’air, je trace de mes mains des mosaïques en monologue. J’attends des lèvres mauves sur mon torse.
(Rien n’est plus rassurant que de détester ce qu’on chérit par-dessus tout.)
Majestueux, un arbre d’hiver trône sur le dernier building, sur ce dernier amas de pierres, sur ce dernier représentant de la puissance de notre civilisation. Et les racines de cet arbre lacèrent et effritent tous les recoins du rectangle avec une rage que je suis le seul à comprendre. Et je suis seul. Et je suis seul pour pleurer en ce jour. Il y a quelque chose d’inachevé dans les mots que je n’écris pas.
Il y avait quelque chose de mort le jour de ma naissance