Je l'ai commencé il y a quelques mois... C'est un essai, donc soyez indulgents^^
EDIPE OU QUELQUES SOUCIS PERSONNELS.
Les personnages.
EDIPE ou ED ou EDDY, roi de Thèbes.
JOCASTE ou JOSIE, veuve de Laïos, femme d’Edipe.
LE CURETON.
CRAYON, fils de Ménécée, frère de Jocaste.
TIRESIAS, oracle.
UN CORENTHIEN.
UN SERVITEUR DE LAÏOS.
UN MESSAGER.
L’aube se lève sur Thèbes, un soleil injecté de sang fait son nid à l’horizon. Au palais royal, dans les appartements royaux, au sein de la chambre royale, dans le lit royal souillé de miettes de pain royales, Edipe, roi, petit déjeune en compagnie de son amante de reine, Jocaste.JOCASTE- Allons mon roi, mon Ed, mon Eddy! Prenez donc une grappe, ce raisin nous provient d’Espagne. Ou peut-être désirez-vous du bacon? Celui-ci vient d’Ecosse, il a séché trois ans durant dans une cave d’Edimbourg. Allons, Eddy! Mangez donc, un roi ne peut tenir une cité le ventre rugissant. Et cessez d’avaler ce maudit café, vous savez aussi bien que moi que cela vous rend nerveux!
EDIPE- La peste me rend nerveux, ma tendre, le café ne fait que me réveiller, m’ouvrir les yeux sur le corps en décomposition de la vieille Thèbes. Notre cité aurait-elle perdue sa gloire d’antan, ces héros romanesques étranglés par le fil du destin? Entendez-vous, ma reine?
JOCASTE- Quoi donc?
EDIPE- Ces plaintes agonisantes au-dessus de nos chambres, ce vent hurlant sa colère comme s’il n’allait plus souffler! Il amène la peste pour se venger, ma reine!
JOCASTE- Se venger? A quel dessein? Pour quelle raison? Croyez-vous que nous faisons trop l’amour?
EDIPE, s’adressant aux courants d’air des appartements royaux- Ô, toi qui fût mon allié le plus dévoué, d’un temps où tu as traîné mes pas indignes jusqu’ici, dis-moi, que viens tu reprendre aujourd’hui? Que viens-tu reprendre?
Le vent souffle un grand coup et fouette de front le visage inquiet d’Edipe
Il nous rappelle à l’ordre, voyez vous? Etendez-vous sa plainte?
JOCASTE- La plainte qui arrive à mes oreilles n’est autre que celle de mon estomac, mon cher. Un matin rassasié est une journée longue.
EDIPE- Soyez sage, ma reine! Etes-vous aveugle de la fin de Thèbes et d’Edipe le roi, le dieu régnant sur terre?
JOCASTE- Je l’ai toujours su, dès le premier instant où je vous ai connu, j’ai tout de suite remarqué que vous étiez complètement mégalomane. Vous me rappelez ce cher Laïos.
EDIPE- Ce cher Laïos n’est plus, ne ressuscitons personne.
JOCASTE- Ô que diable! Mettez donc un terme à ces prophéties hasardeuses et venez plutôt me faire l’amour! Oui, laissons faire votre nature avec la même fougue pleine d’espoir qui vous possédait la nuit dernière!
EDIPE- C’était l’espérance de la nuit, oui ma reine. Et comme chaque soir elle est fugace, et comme chaque matin elle est absente. Je n’ai pas le cœur à cela.
JOCASTE- Ce n’est pas de cœur dont il s’agit, Eddy.
EDIPE- Cessez! On approche.
LE CURETON entre, accompagné de vieillards enfantins tenant leurs chaises roulantesLE CURETON- Salut à toi, ô notre roi Edipe, toi notre demi dieu, représentant de nos divinités et incarnation vivante de leur narcissisme.
EDIPE- Une chance que je ne connaisse ce dernier mot Cureton, mon aimable prêtre.
Qu’amènes-tu comme fardeau? Viens-tu encore sourire de mes pleurs, ou réciter des incantations stupides à l’aide d’un bouillon de trèfle à quatre feuilles? Parle! Je t’intimide?
LE CURETON- Je ne viens ici pour t’annoncer malheur, car malheur plus terrible que le fléau de la peste n’existe en ce moment. Je viens t’implorer, t’abjurer de nous trouver remède de ce fléau n’importe où sur cette terre.
EDIPE- As-tu, pour cela, besoin d’acheminer de pauvres gens dans ce palais?
LE CURETON- Mon roi, c’est pour mieux te souvenir de la souffrance quotidienne qu’endure notre peuple. Regarde, cette femme a perdu ses trois garçons et son mari, il ne lui reste que sa fille, et que faire de cette fille? Celle-ci n’est bonne qu’à lui donner de l’urticaire, elle change d’amants comme de sous-vêtements, découche et a le vin mauvais! Auparavant, ses frères suffisaient à la tenir dans le droit chemin, mais une vieille mère comme elle n’en a plus la force! Tous souffrent d’un mal incurable, la perte des êtres aimés!
EDIPE- Je n’ai pas besoin de tes rappels, prêtre! Sache qu’un roi règne sur Thèbes et qu’il y est omniscient! Ce roi, c’est moi, Edipe, et je sais les souffrances de mon peuple, et je sais mes tourments. Nul ne m’apprend ce que je sais déjà, prêtre!
JOCASTE, à part- Je confirme, c’est un mégalomane.-
Sur ces paroles, elle quitte la scène.LE CURETON- C’est que le peuple se demande si tu es bien encore en vie, ô roi. Il se demande quels projets divins as-tu préparé pour contrer le mal qui ronge nos enfants. Rien dans leur attitude ne peut leur être reproché, ô roi, car c’est bien de l’amour qu’ils te témoignent, en venant ici s’inquiéter de ton sort et de celui de ta cité.
EDIPE- Le peuple! Mes enfants? Ce que tu imagines être mes enfants ne sont que des paysans ingrats et tourmentés par leurs propres soucis! Ce que tu appelles mes enfants je les appelle, moi, des chiens!
LE CURETON- Un chien est toujours dévoué à son maître, sire.
EDIPE- Eh bien, appelons-les donc chats! Ils se plaignent sans cesse! Nous n’avons pas assez de vivres, pourquoi les seuls remparts de la cité sont nos maisons? Pourquoi nous prélevez-vous des impôts sept fois par semaine? Pourquoi les gardes ont-ils le droit de souiller nos femmes? Assez de pourquoi!
LE CURETON- Mais, roi, ils sont venus te demander comment, aujourd’hui.
EDIPE- Qu’ils se gardent de leurs questionnements inutiles. J’ai justement envoyé Crayon, mon cher beau-frère qui jouit, à mon avantage, d’une docilité plus avenante que celle de sa sœur! Il est parti quérir quelques réponses de par la bouche de l’oracle. Puisse Tirésias ne pas divaguer, comme à son habitude, et de nous révéler quelques inepties grotesques.
LE CURETON- Douterais-tu, mon roi, de la véracité des dires d’un homme des dieux? N’es-tu pas, toi-même, représentant de leur puissance?
EDIPE- Dis-moi, Cureton, depuis quand devrais-je croire un oracle qui prédit que l’homme ira un jour dans le ciel? Ou qu’il découvrira que la terre est ronde? Qu’il se déplacera à l’aide de… de voitures?
LE CURETON- Voiture?
EDIPE- Non, mais laissez tomber, j’ai dit ça comme ça, c’est sortit tout seul.
LE CURETON- Avec tout le respect que je te dois, sire, je ne comprends en rien ta démarche. Pourquoi faire appel aux services d’un homme auquel tu ne portes aucun crédit?
EDIPE- Prêtre, je n’ai rien à te justifier, sache-le.
LE CURETON- Je crois tout de même savoir, ô roi. Ne serait-ce pas l’espoir qui te ferait faux pas?
EDIPE- Cela ne te regarde, prêtre! Si je n’étais pas divinité, cela ferait longtemps déjà que je t’aurai sacrifié sur n’importe quel autel!
LE CURETON- Seraient-ce des menaces, sire?
EDIPE- Bien sûr! Que veux-tu que cela soit?
LE CURETON- Ah… bon, ça va alors. Non, j’avais cru que…
EDIPE- Silence, on entre ici!
CRAYON entre par la droite, l’air satisfaitEDIPE- Ah, Crayon, beau-frère, quelle nouvelle me rapportes-tu des visions de Tirésias?
CRAYON- Ne me dis-tu pas bonjour, sire?
EDIPE- Pourquoi te dire cela? La journée ne fait que commencer, je te dirais bonjour ce soir, si ta journée le mérite, bien entendu. Mais, assez, assez de ces futilités, Crayon. Je m’impatiente, et le peuple, ces moutons, font de même apparemment.
CRAYON- Je me suis entretenu avec Tirésias, ce cher oracle…
EDIPE, tournant son regard vers Le Cureton- Bon, déjà, ça commence bien! N’est-ce pas là formidable?! Quelles paroles me rapportes-tu?