Cinq couleurs (On peut toujours)

On peut,
On peut toujours rêver d’espaces
Qu’ils soient verts ou étoilés,
Ici on règle tout en espèce
Pourvu qu’elle soit en voie de disparaître.

On peut,
On peut toujours toucher terre
Qu’elle soit bleue ou bien promise,
Mais si les promesses sont là
C’est pour qu’on ne les tienne pas.

On peut,
On peut toujours être en colère
Qu’elle soit rouge ou verte de rage,
On pourrait toujours en rire
De nos dents blanches et nos rires jaunes.

On peut
Et on pourra toujours y croire,
L’espoir, le bel espoir,
Celui qu’on accroche aux sapins
Les soirs de fêtes païennes.
On pourra toujours rentrer chez soi
En travailleur de classe moyenne
Sur l’autoroute des bouchons
Que feront sauter les patrons.
Nous sommes les hommes qui savent qui savent
Qu’ils ne savent pas grand chose,
Nous sommes de cette race
Qui ne sait faire que défaire,
Qui se masturbe gaiement
En inventant un monde meilleur,
Mais le sperme qui coulera
N’enfantera que la douleur.
Il y a l’art, la culture et la démocratie
Que nous avons créé de toutes pièces de monnaie,
Et de l’autre côté, de l’autre côté
Il y a
Les emballages plastiques
Et les croyances superstitieuses,
Les lunettes de soleil d’intérieur,
Le papier toilette rose ou mauve
C’est comme tu veux, vas-y, choisis,
Les conventions européennes,
Les traités de Yalta,
Les guerres de religions
Qui n’ont fait la paix qu’aux morts,
Les syndicats usés,
Et ces pavés que nos parents jetèrent,
En s’empilant, firent des murs
Que l’on nomme libéralisme,
Les guerres chaudes aux vengeances froides
Et les guerres froides aux vendanges d’aube,
La poésie de l’industrie du disque
Et du septième art(r)iste.
Alors on peut,
On peut toujours et on y croit,
On croit toujours qu’on reste nous,
On dit amen, on plante des clous,
Créant l'histoire sur une croix.

Alors on peut toujours,
On peut toujours rêver d’espaces
Qu’ils soient verts ou étoilés,
Ici on règle tout en espèce.

Pourvu
Qu’elle soit en voie
De disparaître.