Aubes mortes

Il n’y a d’aube à avorter
Que dans un rêve à ta portée,
Aux creux de toi et de tes nerfs,
En silence sous la poussière.
Il n’y a pas d’heaume à porter,
Pas plus de grève à exhorter
De chants sanglants et populaires
De faux semblants à faire taire.

Baignons nos larmes folles
En ce ciel gris et lourd d’atomes,
Sous l’ombre de ma paume
Se dénouera ton souple col.
Marchons à mort, amour,
Sous les dagues d’un soleil bas
Et ne faisons la cour
Qu’à des vagues d’océans las.
L’automne nous ressemble
Mille couleurs, mille teintures,
Quand le vent et l’eau tremblent
Juste à l’effet de la nature.
Taisons nos rêves sobres
Pour mieux hurler notre folie,
Vivons tous les octobres
Pour mieux brûler toutes ses nuits.
Certains jours se font tard,
Aux ombres nées de sombres mots,
Et sous les soubresauts
De cette peur c’est le hasard.

Il n’y a d’aube à avorter,
Ni de douleur à supporter,
Qu’au creux de toi, de tes frissons,
De ces pays à nos façons.
Il n’y a d’aube à avorter
Ni de rêves à emporter,
Des mots noyés par la mousson
Persisteront toujours leurs noms.